Ma mère,
Pourquoi ne m'as-tu jamais donné
Le câlin chaud, le gros baiser
Qui vient du fin fond des entrailles ?
Pourquoi, d'un air paisible et doux,
N'as-tu pas demandé au loup,
Au croquemitaine, qu'ils s'en aillent ?
Tu sais, je me r'trouve aujourd'hui,
A trent' -sept ans, toutes les nuits,
Encore privé de tes caresses,
J'ai pas d'mandé à voir le jour
C'est les parents qui font l'amour
Et les mères qui font les grossesses...
Ma mère,
Tu ne m'as sûr'ment pas voulu
Mais j'étais là, fragile et nu,
Les bras tendus comme des branches,
Un enfant a besoin de tout,
De feuilles mortes et de toutous,
Et de tendresse et de dimanches...
Ah ! ces dimanches, auprès de toi,
A mon retour de l'internat,
- Dieu ! Que la semaine était lente -
J'aurais voulu que tu me serres
Tout contre toi, tu sais, ma mère,
Et qu'on rie tous deux, et qu'on chante !
Ma mère,
Comm' d'autr's, tu avais tes problèmes,
Ça doit pas empêcher qu'on s'aime,
Qu'on ait de l'amour à revendre,
De l'amour, j'en avais des tonnes
Bloquées au niveau du sternum,
Et puis des envies de me pendre
Tu sais, je me r'trouve aujourd'hui
Devant les gens, devant la vie,
Recroquevillé dans ma peur,
Er quand on s'rencontre un instant,
On parl' de la pluie et du temps
Avec, entre nous, la pudeur !
Ma mère, Si j'ai fait cett' petit' chanson
C'est que ça ne tournait pas rond
Dans ma poitrine, c'est que je t'aime,
Le prochain jour que l'on se voit
Approche-toi plus près de moi :
Tu sais, je ne mords pas quand même...
Il nous reste si peu de temps
Pour rattraper les heures d'antan,
Avant que la mort ne nous prenne,
Pourquoi ne pas boire tous les deux
Là où boivent les gens heureux,
Ensemble à la même fontaine ?
Pourquoi ne pas boire tous les deux
Là où boivent les gens heureux,
Ensemble à la même fontaine ?