Avant-hier, bêtement, j'ai relu "Le Grand Meaulnes",
J'ai traqué mon enfance au fil des pages jaunes,
Dans un coin de grenier, j'ai voulu, sans vergogne
Et sans billet, refaire mon voyage en Sologne,
Dans un coin de grenier, j'ai voulu, sans vergogne
Et sans billet refaire mon voyage en Sologne,
Mais j'ai bien, j'ai bien trop lu, trop lu
De livres pour les grands:
Ah! Dieu, que je suis déçu, déçu
Par mes livres d'enfants!
Hier matin, je m'embarque, pour un pélerinage,
Vers mes quinze ans blottis dans leur petit village,
Le coeur battant, le long d'un sentier d'haridelles,
J'attends Baffalo Bill sur un coin de margelle,
Le coeur battant, le long d'un sentier d'haridelles,
J'attends Baffalo Bill sur un coin de margelle,
Mais j'ai bien, j'ai bien trop vu, trop vu
De palais formidables:
Ah! Dieu, que je suis déçu, déçu
Par mes châteaux de sable!
Aujourd'hui je te parle, comme à une étrangère,
Mon aimée d'autrefois, ma mie, mon écolière,
Et, te disant bonjour, je voudrais, tant et tant,
Te dire que notre amour a encore dix-huit ans,
Et, te disant bonjour, je voudrais, tant et tant,
Te dire que notre amour a encore dix-huit ans,
Mais j'ai bien, bien trop couru, couru
Les filles de passage:
Ah! Dieu, que je suis déçu, déçu
Par les dames trop sages!
Demain, je blanchirai, à l'ombre d'un sapin,
De routine en regrets, de regrets en refrains,
Et j'essaierai encore, une dernière fois,
De refaire, à rebours, mon long chemin de croix,
Et j'essaierai encore, une dernière fois,
De refaire, à rebours, mon long chemin de croix,
Mais, je n'aurai jamais pu, non jamais pu
Apprivoiser le Temps:
Ah! Dieu, que je suis déçu, déçu,
Que je suis décevant!