T'as toujours ton carquois et tes flèches,
T'es le plus beau,
Mêm'e si le "scotch", les femmes et la dèche
Ont eu ta peau,
T'as r'sorti ta lame de Tolède
Et t'as fait mouche,
Ecrasé vingt "pin-ups" superbes
Contre ta bouche...
J'en bavais des ronds d'chapeaux,
Au vieux ciné "L'Mexico",
Boul'vard des Capucines,
Et quand j'reprenais l'métro,
J'étais Don Juan, l'Hidalgo,
Errol Flynn!
Spadassin, cow-boy ou militaire,
T'étais le seul
A rendr'e sympa ce fumier d'Custer,
Sans que je gueule,
Et lorsque la reine d'Angleterre,
Dans un d'tes films,
Te fait décapiter sans manières,
Ah ! la déprime...
Je reprenais le métro,
Au diable "Le Mexico",
Adieu, Gentleman Jim,
Et j'pleurais des larm'es de veau,
Gros chagrin et gros sanglots,
Sur Errol Flynn!
J'étais minaud, que la vie est vache,
J'aurais donné
Toutes mes bill'es, pour que ta moustache
Fût sous mon nez,
Pour qu'la pisseuse du marchand de viande,
Qui m'faisait marcher,
Me r'garde comme Olivia d'Haviland
Te regardait...
Tous les deux, sans dire un mot,
On reprenait le métro,
Un'e boule dans la poitrine,
Moi, jaloux et elle, c'est trop,
Rêvant de toi, mon salaud,
Toi, Errol Flynn!
Et, aujourd'hui, que le Temps grimace,
Qu'il fait moins beau,
Je pense à toi, toi, moitié Paillasse,
Moitié Rimbaud,
Et, cette nuit, je t'élève un buste,
Par ma chanson,
Pour tous les beaux rêves de flibuste
D'un p'tit garçon,
Qui attachait ses chevaux,
D'vant l'saloon "Le Mexico"
De la bell'e Capucine,
Lavallière, cheveux corbeau,
Colts blancs et grand chapeau
Comme Errol Flynn!